Matam, 31 déc (APS) -
La pêche fluviale se meurt dans la
région de Matam, du fait de la rareté du poisson qui a privé les
pêcheurs d’une importante source de revenus.
La morosité qui frappe cette activité
pratiquée le plus souvent sur le fleuve Sénégal, pour l’essentiel par
les pêcheurs thioubalo et dans une moindre mesure les communautés
mathioubés et sebbés, notamment, n’a pas commencé aujourd’hui.‘’C’est la mort de cette activité qui a causé l’exode massif des bras valides dans les années 70’’, explique Sidi Cissé, un habitant du quartier Soubalo, à Matam.
La rareté du poisson a selon lui poussé certains fils du terroir à aller ‘’chercher fortune’’ dans d’autres pays plus nantis en Europe et en Afrique centrale, notamment, dans le but de pouvoir soutenir les vieillards, les femmes et les enfants restés au pays.
Alioune Diop, le chef du Service régional des pêches et de la surveillance de Matam reconnaît que le secteur rencontre des difficultés énormes. Il peine en effet à fournir suffisamment de poissons pour satisfaire les besoins en poissons des populations locales, explique-t-il.
Il précise que ‘’l’irrégularité des crues du fleuve qui empêche les poissons de se reproduire, les aménagements hydro-agricole qui freinent les mouvements migratoires et la surexploitation des ressources halieutiques dans les années 70 sont les trois phénomènes qui ont freiné le développement de la pêche au niveau de la région’’.
Toutes les associations de pêcheurs de la région, celles de Matam et Kanel en particulier, partagent le constat selon lequel cette activité bat aujourd’hui de l’aile, pour ne pas dire qu’elle est presque morte, à cause de la rareté du poisson sur le fleuve Sénégal.
Du coup, l’approvisionnement des populations en poissons se fait en grande partie grâce aux camions frigorifiques qui viennent de Saint-Louis.
Les mareyeurs de la région font venir chaque jour ‘’plus de 20 caisses de poissons’’, indique Bocar Bâ, le président de leur association. Ils les achètent à raison de 50.000 ou 60 000 FCFA l’unité.
Certains tenants de restaurants semblent en tout cas trouver leur compte dans cette situation. Il en est ainsi de Mme Ba, une restauratrice établie à Matam. Elle explique que la majorité de sa clientèle préfère le poisson d’eau de mer. Raison pour laquelle elle l’achète aux camionneurs en provenance de Saint-Louis, tout en veillant également à satisfaire les exigences d'autres clients avec le poisson d’eau douce.
Mais pour Faty Barry, une ménagère, ce n’est que parce que les consommateurs n’ont pas d’autre choix qu’ils se rabattent sur le poisson d’eau de mer. Non seulement le produit local est presque introuvable, mais son prix reste aussi hors de portée de toutes les bourses, justifie-t-elle.
Quoi qu’il en soit, certains pêcheurs semblent désemparés devant le manque de produits halieutiques. Cette situation est illustrée par cette idée lancée par Dialel Samba Yam, le président de l’Association des pêcheurs du département de Matam, qui suggère d’ériger des barrages à l’entrée de chaque marigot, pour retenir les poissons après la décrue. Cette méthode serait selon lui pratiquée par des pêcheurs mauritaniens.
Le président de l’Association des pêcheurs de Kanel, Balla Sall, réclame lui du matériel de pêche et le développement de la pisciculture, une activité qui est, dit-il, génératrice de revenus.
Moussa Fall, un jeune pêcheur habitant Soubalo, un quartier de pêcheurs lance, quant à lui un véritable cri de cœur : ‘’Je ne vis que de la pêche, elle constitue la seule activité de ma vie. Je suis parvenu à réaliser d’énormes choses grâce aux revenus issus de cette activité. Je demande à l’Etat du Sénégal de nous aider à créer les conditions d’une situation favorable à l’activité, en procédant à des lâchers d’eau sur le fleuve durant un mois, voire plus pour permettre aux poissons de se reproduire’’.
‘’Cette activité [la pêche] est beaucoup prisée par nos fils qui veulent assurer la relève mais, malheureusement, le fleuve et ses défluents ne sont plus poissonneux, à cause du barrage de Mantali’’, se désole Ousmane Guèye, "dialtabé" (responsable du fleuve) de Matam, craignant de la voir disparaître, si les choses restent en l’état.
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